Circulaire Retailleau : Durcissement des conditions de régularisation par Admission Exceptionnelle au Séjour
La circulaire est un acte administratif émi par une autorité pour orienter l'application de dispositions législatives. En droit des étrangers, elle joue un rôle crucial dans la politique migratoire en France.
La dernière en date, la circulaire Retailleau, publiée le 23 janvier 2025, modifie les critères d'Admission Exceptionnelle au Séjour (AES) pour les étrangers en situation irrégulière.
Qu'est-ce que l'Admission Exceptionnelle au Séjour ?
L'AES permet d'accorder un titre de séjour à des étrangers qui ne remplissent pas les critères habituels, mais qui justifient de circonstances particulières, telles qu'une longue présence en France ou une situation humanitaire. Contrairement au droit commun, qui impose des règles strictes, l'AES repose sur le pouvoir discrétionnaire des Préfets, rendant son application souvent imprévisible.
Les changements apportés par la Circulaire Retailleau
La circulaire Retailleau introduit un durcissement des conditions d'accès à l'AES. Parmi les nouvelles exigences, on note :
La présence minimale de sept ans de l’étranger sur le territoire français : Ce critère vise à limiter les demandes de régularisation pour motifs exceptionnels ;
La signature d'un contrat d'engagement aux valeurs de la République : une condition qui renforce l'idée d'une intégration à la culture française ;
L’obtention d'une certification linguistique : les demandeurs doivent prouver leur maîtrise de la langue française, rendant l'accès à la régularisation encore plus difficile.
Ces changements traduisent une logique de tri et d'exclusion, complexifiant l'accès à la régularisation pour de nombreux étrangers.
Un enjeu de main d’oeuvre dans les secteurs en tension
Le Ministre de l’Intérieur justifie ce durcissement par la nécessité de réduire l'immigration illégale. En 2023, 34 724 personnes ont obtenu un titre de séjour via l'AES, un chiffre stable par rapport à 2022. Cependant, avec les nouvelles règles, l'accès à la régularisation devient plus restrictif, notamment pour les demandeurs souhaitant faire une demande pour motif familial ou humanitaire.
Comparaison avec la Circulaire Valls de 2012
La circulaire Retailleau marque un tournant restrictif par rapport à la circulaire Valls de 2012, qui offrait une approche plus flexible. À l'époque, les régularisations étaient possibles après cinq ans de résidence, avec des critères moins stricts pour les travailleurs dans des secteurs en tension. La maîtrise de la langue française n'était exigée qu'à un niveau élémentaire, facilitant ainsi l'accès à la régularisation.
Conséquences de la politique de durcissement
Nul n’en doute ces changements mis en œuvre par le nouveau gouvernement, visent à contrôler l'immigration en favorisant une régularisation économique et sélective. Toutefois, elle fragilisent les étrangers les plus précaires, qui se retrouvent dans une situation de plus en plus difficile limitant leur accès à des droits fondamentaux.
Le durcissement des conditions d'AES pourrait également favoriser le développement de pratiques abusives, notamment par des intermédiaires illégaux exploitant la détresse des sans-papiers. Loin de favoriser une intégration harmonieuse, cette politique risque de renforcer la marginalisation des sans-papiers et d'alimenter les réseaux d'exploitation illégale.
Conclusion
Il est crucial de rappeler que ces nouvelles dispositions ne devraient s'appliquer qu'aux AES et non aux étrangers relevant du droit commun. Cependant, dans la pratique, les préfets semblent appliquer ces règles de manière généralisée, ce qui pourrait conduire à une interprétation excessive des dispositions.
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